jeudi 3 mars 2022

Mars 2022

La Charité : qu’est-ce ?


Je parlais de charité et d'amour. Or, une des marques de la charité (et il y en a beaucoup d'autres, mais je choisis celle-là de préférence, parce qu'elle se rapporte à mon sujet), une des marques de la charité, de l'amour pur, le seul dont on puisse parler dans l'assemblée des Saints, c’est d'échanger un secret. Un homme qui fait une confidence fait un acte de confiance intime, il livre le fond de son âme à celui auquel il se confie. C'est ainsi que les choses se passent parmi nous, et c'est ainsi qu'elles se passent chez Dieu. Lorsque le Seigneur aime, il ne peut plus retenir ses secrets. Il est d'une incomparable faiblesse, le Seigneur, dès lors qu'il aime.

Le bienheureux Jacopone da Todi, auteur présumé du Stabat Mater, contemplant les excès d'amour, les folies du Seigneur, enivré de surnaturel, disait des extravagances. Ses supérieurs s'en émurent et le reprirent. Un jour, le Seigneur lui-même parut le lui reprocher: «Attention, du calme, il faut être discret; de l'enthousiasme bien, mais pas de ces exagérations, pas de ces folies ». Et le bon Saint de répondre au Seigneur: « Ah ! Seigneur, vous en avez fait bien d'autres! ».

 Eh ! bien, oui, lorsque le Seigneur aime, il fait des folies ... Rappelez-vous comment il parlait à Abraham.  On dirait vraiment qu'il ne peut se contenir avec son serviteur ; son secret lui pèse comme un intolérable fardeau, il ne peut le garder, il faut qu'il le lui livre: « Pourrai-je cacher à Abraham ce que je fais faire? » (Gn 18,17). Son secret lui échappe irrésistiblement. Oh ! que vous êtes faible, Seigneur !

Dieu n'a pas changé dans la loi nouvelle. Par quel procédé, le Seigneur qui nous aimait, nous a-t-il montré son amour? Il nous a dit. А nous pauvres atomes, il s'est livré tout entier. « Je ne vous nomme pas serviteurs ... mais je vous appelle amis, car tout ce que j'ai appris de mon Père, je vous l'ai fait connaître» (Jn 15, 15). Voyez- vous? Nous connaissons la sainteté de Dieu, nous connaissons ce que les Anges eux-mêmes ignoraient, s'ils n'eussent été élevés à l'ordre surnaturel. Nous connaissons ce que nulle créature ne pourrait connaître, à moins que Dieu lui-même ne le lui eût dit. Ce mystère de la vie intime de Dieu, ce mystère de la fécondité de Dieu, ce secret de Dieu, Dieu nous l'a révélé: c'est le mystère de la Sainte-Trinité, cette glorieuse et ineffable fécondité de notre Dieu qui nous le montre ne ressemblant à rien, et l'élevant au-dessus de tout.

Je vous en conjure, ne redoutez pas ces hauteurs. Elles doivent vous être familières. C'est là le vrai Dieu, c'est là le Dieu vivant. Le Dieu vivant n'est pas cette ombre indécise de la Philosophie, la catégorie de l'Idéal, un instrument de politique utilitaire, un thème de littérature honnête, la matière d'une belle interrogation. Non, le vrai Dieu, c'est la Très Sainte Trinité, le Père, le Fils et le Saint-Esprit: il n'y en a pas d'autre. Mais si Dieu nous a révélé ce mystère, est-ce pour éprouver notre intelligence ? Oh ! non, c'est pour couronner notre intelligence, pour nous faire connaître le secret de sa vie intime, pour se dire tout entier, pour nous faire comprendre le mystère de l'Incarnation, sans cela inexplicable, pour nous faire comprendre aussi tout l'ordre surnaturel.

Dom Paul Delatte

(Contempler l’invisible, p 33, 34)

 

Résolution :

Pour bien recommencer notre croisade après cette longue pause, remettons-nous face à ce qu’est vraiment cette vertu et méditons ce sujet en ce temps du Carême, meilleure manière de nous préparer à nous bien unir à la Passion de notre Sauveur.  Cela nous enthousiasmera dans notre travail apostolique, chacun à notre place.