A l’école de Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus
Ce n'est pas toujours possible,
au Carmel, de pratiquer à la lettre les paroles de l'Évangile, on est parfois obligé
à cause des emplois de refuser un service, mais lorsque la charité a jeté de
profondes racines dans l’âme, elle se montre à l'extérieur. Il y a façon si gracieuse de refuser ce qu'on ne
peut donner, que le refus fait autant de
plaisir que le don. Il est vrai qu’on se
gêne moins de réclamer un service à une sœur
toujours disposée à obliger, cependant Jésus a dit : " N'évitez point celui qui veut emprunter de vous. " Ainsi sous prétexte qu'on serait forcée de
refuser, il ne faut pas s'éloigner des sœurs qui ont l'habitude de toujours
demander des services. Il ne faut pas non plus être obligeante afin de le paraître
ou dans l'espoir qu'une autre fois la sœur qu'on oblige vous rendra service à
son tour, car Notre- Seigneur a dit encore: "
Si vous prêtez à ceux de qui vous espérez recevoir quelque chose, quel gré vous
en saura- t-on? Car les pécheurs mêmes prêtent aux pécheurs afin d'en recevoir
autant. Mais pour vous, faites du bien, PRÊTEZ SANS EN RIEN ESPÉRER, et votre récompense
sera grande. " Oh oui ! la
récompense est grande, même sur la terre ...
dans cette voie il n'y a que le premier pas qui coûte. Prêter
sans en rien espérer, cela paraît dur
à la nature; on aimerait mieux donner, car une chose donnée n'appartient
plus. Lorsqu'on vient vous dire d'un air tout à fait convaincu: " Ma sœur,
j'ai besoin de votre aide pendant quelques heures, mais soyez tranquille, j'ai permission
de notre Mère et je vous rendrai le
temps que vous me donnez, car je sais combien vous êtes pressée. "
Vraiment, lorsqu'on sait très bien que jamais le temps qu'on prête ne sera rendu, on aimerait mieux
dire: " Je vous le donne. " Cela contenterait l'amour-propre car
donner, c'est un acte plus généreux que de prêter et puis on fait sentir à la sœur
qu'on ne compte pas sur ses services... Ah ! que les enseignements de Jésus
sont contraires aux sentiments de la nature ! Sans le secours de sa grâce
il serait impossible non seulement de les mettre en pratique mais encore de les
comprendre. Ma Mère, Jésus a fait cette grâce à votre enfant de lui faire pénétrer
les mystérieuses profondeurs de la charité; si elle pouvait exprimer ce qu'elle
comprend, vous entendriez une mélodie du Ciel, mais hélas ! je n'ai que
des bégaiements enfantins à vous faire entendre... Si les paroles mêmes de Jésus
ne me servaient pas d'appui, je serais tentée de vous demander grâce et de laisser
la plume... Mais non, il faut que je continue par obéissance ce que j'ai
commencé par obéissance.
Manuscrits autobiographiques
(A Mère Marie de Gonzague : Lumières
sur la Charité)
Résolution
Quelle est notre intention lorsque nous prêtons quelque chose ? Mais surtout lorsque nous prêtons notre temps en rendant service ?